CLOUZOT
le diabolique


Posté le 16.10.2017 à 11H


 

Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur l'auteur du Salaire de la peur et de Quai des orfèvres.

 

PRISONNIERE 1968 Tou

 

A comme Artiste

Il est l'un des premiers réalisateurs à être médiatisé, dont le visage est familier du public, comme Alfred Hitchcock ou Orson Welles. Ses producteurs ne lui refusent rien : la Columbia lui offre un budget illimité pour tourner L'Enfer, en 1964.

 

B comme Bardot

Sur le plateau de La vérité, son dixième film, Clouzot gifle sa vedette Brigitte Bardot, se comportant, dit-on, comme avec la plupart des comédiennes qu'il dirige. Mais celle-ci ne se laisse pas faire et le gifle à son tour, lui écrasant le pied en prime. Clouzot a compris, il ne lèvera plus la main sur elle.

 

C comme Corbeau

Réalisé en pleine Occupation, inspiré d'un fait divers survenu dans les années 20, le film dénonce les lâchetés, petites et grandes, provoquées par des lettres anonymes, qui plongent une petite ville de campagne dans un climat délétère de suspicion et de ragots. Dans la France du maréchal Pétain, on rafle, torture, on exécute, souvent sur la foi de lettres de dénonciation anonymes, que le pouvoir encourage. "J'ai été foutu à la porte par la Continental parce que la Kommandantur s'est plainte de ce que le film décourageait les auteurs de lettres anonymes", relatera Clouzot.

 

D comme Dialogues

Les films de Clouzot sont réputés pour l'efficacité de leurs dialogues. La comédienne Suzie Delair, qui fut l'épouse du cinéaste, a inspiré nombre de dialogues truculents de ses personnages.

 

E comme Expressionnisme

Certains plans doivent beaucoup au séjour de Clouzot en Allemagne, où il a travaillé avant la guerre. On y retrouve l'influence de l'expressionnisme allemand de Murnau, Fritz Lang, dans l'usage de la lumière, la façon de cadrer les plans.

 

F comme Fin

À la fin des Diaboliques, un carton incite les spectateurs à ne pas se montrer eux-mêmes "diaboliques" en livrant à leurs amis la clé du film... Et dès le début des projections, les portes des salles sont fermées, les retardataires n'étant pas autorisés à entrer.

 

G comme Gard

Le salaire de la peur, dont l'action se passe en Amérique centrale, est en fait tourné dans le Gard. Charles Vanel, alors un peu oublié à 60 ans, se voit confier le rôle de Jo, refusé par Jean Gabin qui ne veut pas interpréter un personnage de "lavette".

 

DIABOLIQUES 1955 13

 

H comme Hallyday

Le futur Johnny Hallyday joue l'un des élèves de l'institut dirigé par Paul Meurisse dans Les Diaboliques. Il débute à l'écran, tout comme Michel Serrault.

 

I comme Insomniaque

Grand insomniaque, Clouzot confie à Serge Reggiani le rôle d'un insomniaque dans l'Enfer. "J'ai eu l'idée d'exploiter cette espèce de malaise anxieux qui me prend chaque nuit et qui m'empêche de dormir", dit-il. A 20 ans, fait de tels cauchemars qu'il se force à ne pas dormir.

 

J  comme Jouvet

"Sa maîtrise de metteur en scène est complète: il est sûr de lui et il vise juste. Mais je crois qu'il est en grande difficulté avec lui-même", affirme Louis Jouvet, après avoir tourné trois films avec lui: Quai des orfèvres, Le retour de Jean et Miquette et sa mère.

 

K comme Kafka

Projet ambitieux, Les Espions qui succède aux Diaboliques en 1957, est pour Clouzot une "noire tragédie de l'ère atomique". Ce film à l'ambiance kafkaïenne, qui se déroule dans le cadre sordide d'une clinique psychiatrique, est mal accueilli. Le scénariste Henri Jeanson aura ce mot féroce : "Clouzot a fait Kafka dans sa culotte".

 

L comme Las

Après Quai des orfèvres, il se dit "las des scénarii conventionnels, des viieilles ficelles des films romancés", en panne d'inspiration. Il veut tourner au Brésil un film "absolument subjectif", qui marquera une rupture. Celui-ci ne verra pas le jour, mais il écrit un livre: Le cheval des Dieux.

 

M comme Malade

Jeune, Clouzot fait l'expérience de la proximité de la mort. Atteint de pleurésie à 26 ans, il doit rester alité pendant quatre ans et en conserve "un goût de mort dans la bouche".

 

N comme Névroses

Le cinéaste est fasciné par les névroses humaines. Dans Les Diaboliques, le concierge de l'institut joué par Jean Brochard, l'un des acteurs fidèles au cinéaste, diagnostique une tendance à l'"agoraphobie". Et l'Enfer, dont le tournage sera abandonné en 1964 après un infarctus du cinéaste, a pour sujet la jalousie.

 

O comme Obsession

Obsédé par le Mal, il a une vision très noire des êtres et du monde.

 

P comme Peintre

Il a exprimé à plusieurs reprises son regret de ne pas être devenu peintre. Avec Le mystère Picasso, il veut saisir chacune des étapes de la création et réalise un film extraordinaire sur l'art.

 

Q comme Quai des orfèvres

Il passe quatre mois au Quai des orfèvres pour donner de l'authenticité à ce film noir, très réaliste et documenté. Il qualifie le film de "criminaliste", voulant dire par là que la question n'y est pas vraiment de savoir qui a tué.

 

R comme Réhabilitation

Selon son frère Jean Clouzot, "Il a presque toujours travaillé à la réhabilitation de gens déconsidérés." Il brouille la frontière entre bons et méchants: pour lui nous sommes tous coupables, ou pourrions l'être, ce qui revient au même.

 

Salaire-de-la-peur01

 

S comme Salaire de la peur

"Je viens de recevoir un génial coup de pied dans le ventre !", s'exclame l'acteur Edward G. Robinson, membre du jury du festival de Cannes où le film rafle le Grand Prix, en 1953. Concentré de suspense à la mise en scène brillante, c'est un film tendu à l'extrême où pourtant, le réalisateur prend son temps: plus d'une heure se passe avant que les camions ne démarrent. Ce sera son plus grand succès commercial, en France et à l'étranger.

 

T comme Tension

Il installe une tension terrifiante sur les plateaux, avec ses acteurs, les gifle, les maltraite. "Quand on dirige un acteur, je crois qu'il faut le mettre dans un certain état nerveux. Quand vous faites 6 ou 7 prises, le comédien ne peut plus retrouver cet état nerveux: il faut l'y aider par n'importe quel moyen", dit-il.

 

U comme Une petite ville française

Le Corbeau aurait été projeté sous ce titre, en Allemagne: cette rumeur lui vaut d'être interdit à la Libération, où le film est considéré comme "anti-Français". Clouzot et Chavance, son scénariste sont frappés d'une interdiction de travail à vie, qui sera levée par la suite.

 

V comme Vampire

"C'était un vampire. Il avait un instinct très sûr pour sélectionner les gens qui pouvaient être susceptibles de l'intéresser.  Les gens qui allaient apporter de l'eau à son moulin ou du feu à son enfer",  selon une collaboratrice.

 

W comme William Friedkin

Le réalisateur américain, qui adaptera à son tour le roman de Georges Arnaud en 1977 avec Le convoi de la peur, rencontre Clouzot l'année d'avant et lui demande le secret du Salaire de la peur. "Les détails !" lui répond le cinéaste.

 

X comme EX

Selon la "cote morale" de la centrale catholique du cinéma, le film La Prisonnière est classé "EX: Pour adultes, avec d'expresses réserves", quand Les Diaboliques obtiennent un "4 B: A déconseiller".  Quant à La Vérité, Le Corbeau et Manon, ils décrochent la mention "5 : À proscrire".

 

Y comme Yves Montand

Pour incarner Mario, le Parigot qui entretient sa nostalgie du pays grâce à un ticket de métro dans Le Salaire de la peur, il choisit Yves Montand, qui n'a tourné que dans des films mineurs depuis l'échec des Portes de la nuit de Marcel Carné.  Clouzot, sûr de son choix, le fait longuement travailler. Il sera excellent.

 

Z comme Zone neutre

"Pour toucher le spectateur, je vise toujours à accentuer le clair-obscur, à opposer la lumière et l'ombre", dit-il. "Pour moi, la grande règle, c'est porter les contrastes à leur maximum, les 'pointes' extrêmes du drame étant séparées par des 'zones neutres".

 

Rébecca Frasquet

 


 

Le mystère Clouzot

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