Posté le 14.10.2017 à 11H
C'est un élégant crooner à la voix de velours, un cinéphile passionné de rock, d'Amérique et de western – parce que leurs héros sont "entiers" et qu'il n'y a "rien à gratter" dit-il –, mais aussi un excellent acteur révélé par Coup de torchon de Bertrand Tavernier, qui ouvre cette 9e édition du festival Lumière.
"À 13 ans, a raconté le comédien Guy Marchand, avec Claude Moine (alias Eddy Mitchell) on allait tout le temps au cinéma, au Danube palace, au premier rang. On rêvait d’entrer dans l’écran". Animateur pendant 16 ans, de 1982 à 1998 sur France 3, de l'émission culte appelée La Dernière Séance en hommage à l'un de ses plus grands tubes, Eddy Mitchell a fait partager son amour des classiques du cinéma américain… et des petites salles de quartier, à "double programme" et "actualités". Généreux, aussi érudit qu' enthousiaste, il y défendait les films noirs et les westerns, un genre où "il y a de l'espace" faisait-il valoir, car "on ne se cogne pas dans les gens, dans les westerns", programmant en prime time des cinéastes peu connus en France comme André De Toth, Gordon Douglas ou Jules Dassin.
Avec Les Chaussettes Noires, le premier grand groupe de rock français, il a fait swinguer la génération yéyé, comme son complice Johnny Hallyday avant de devenir chanteur solo, mais "pas un vrai crooner car, pour moi, le seul vrai crooner qui soit c'est Dean Martin", précise-t-il. En pensant à lui, impossible de ne pas fredonner Pas de Boogie Woogie, Couleur menthe à l’eau, Le Cimetière des éléphants, Il ne rentre pas ce soir… des mélodies inoubliables et des textes empreints d'un spleen délicat, dont il est l'auteur.
À l'écran, l'ex gamin de Belleville campe un irrésistible bon vivant, jovial et grivois dans Le Bonheur est dans le pré d’Étienne Chatiliez, qui lui vaut le César du meilleur acteur dans un second rôle en 1995. "Sous sa carapace de râleur, de type bourru, Eddy Mitchell a un cœur immense et une vraie intelligence d’acteur. N’oubliez pas qu’il est chanteur et auteur ! Il écrit les textes de ses chansons. Il comprend vite ceux d’un scénario et les restitue à merveille", a dit le réalisateur, qui en a fait l'un de ses comédiens fétiches. Naturellement doué pour la comédie avec son art consommé du sous-entendu goguenard, il a aussi tourné avec Jean-Pierre Mocky (À mort l'arbitre), Jacques Bral (Un printemps à Paris), Claude Lelouch (Salaud, on t'aime), Marco Ferreri (I love you)… Et sur le plateau de Coup de torchon de Bertrand Tavernier où il débute en 1981, il campe un crétin d’anthologie, et endort sa "trouille bleue" à coups de "Jeannot le Marcheur" – le whisky Johnny Walker –, a raconté Philippe Noiret.
Il tourne actuellement le premier film de Christophe Duthuron, l’adaptation d’une BD à succès, Les Vieux fourneaux, avec Pierre Richard et Alice Pol. Cet admirateur de Chuck Berry et d'Elvis Presley était encore sur scène avec Johnny Hallyday et Jacques Dutronc pour la tournée des Vieilles Canailles. Pour le grand plaisir du public de Lumière, il vient lancer le festival et présentera une séance de Coup de torchon à ne pas manquer, dimanche.
Rébecca Frasquet
Rencontre avec Eddy Mitchell
Dimanche 15 octobre au Pathé Bellecour à 11h15
Coup de torchon
Dimanche 15 octobre au Pathé Bellecour à 17h30