GUILLERMO DEL TORO
Le génie de Guadalajara


Posté le 14.10.2017 à 11H


 

Invité d'honneur du festival Lumière, le cinéaste mexicain est à (re)découvrir en quatre films lors d'une Nuit très spéciale à l'Institut Lumière. Suivront une alléchante Carte Blanche, une Master Class à ne manquer sous aucun prétexte et son dernier film en avant-première !  Entre réalisations fantastiques intimistes et blockbusters plus classiques, flashback sur l'univers d'un auteur hollywoodien.

 

Pan

 

Quand Alfonso Cuarón rencontre Guillermo del Toro sur le tournage de la série mexicaine La Hora Marcada, il est déjà question du "génie de Guadalajara". En 1993, Cronos signe le début de son succès avec une sélection au festival de Cannes. Ce conte surnaturel au vampirisme réinventé donne le ton du style del Toro, imprégné d’un imaginaire intense puisé dans sa tendre jeunesse, peuplé de monstres, de symbolisme geek et de créatures baroques. Sur fond de Guerre civile espagnole et de franquisme esthétisés, L’Échine du diable (2001) puis Le Labyrinthe de Pan (2006) explorent aussi les mécanismes de défense de l’enfance face au surnaturel et à l’horreur. Le Labyrinthe de Pan décroche trois Oscars: meilleure photographie, meilleur maquillage et meilleure direction artistique. Et la merveilleuse interprétation de la petite Ofelia (Ivana Baquero) est récompensée d’un Goya. La performance irréprochable de Sergi López en capitaine fasciste et détestable reste, quant à elle, imprimée dans les rétines.

En authentique génie, le cinéaste fourmille de projets. En 2002 et à quelques mois d’intervalles de L’Échine du diable, sort le tonique et sanglant Blade II (2002), blockbuster décomplexé enlevé par Wesley Snipes en glaçante créature homme-vampire. 2004 est l’année de la superproduction Hellboy, transposition efficace du héros de comic sur grand écran, dont le deuxième volet sorti en 2008 (Hellboy II, Les Légions d’or maudites) se révèle plus personnel et proche de la parabole. Le choix se porte à nouveau sur le génial Ron Perlman pour donner vie à ce démon farceur peint à l’hémoglobine, lascar buveur de bières et amateur de cigares. Dans Pacific Rim, grande odyssée de l’été 2013, Guillermo del Toro dirige son acteur fétiche pour la cinquième fois : les monstres génétiquement mutés (Kaiju) et les robots géants (Jaeger) s’y livrent à des combats titanesques, dans la pure tradition des films de science-fiction japonaise de type Godzilla. Une fois encore, Guillermo del Toro insuffle un supplément d’âme (et d’humour) à ses films à gros budget. En 2015, changement de registre avec la romance d’horreur gothique Crimson Peak, que Stephen King, maître du genre, n’hésitera pas à qualifier de superbe et de "complètement terrifiante". Ennemi des faux-semblants, Guillermo del Toro poursuit sa "croisade contre le cynisme" : « Nous vivons dans un monde étrange où haine et cynisme sont vus comme des signes d’intelligence : si tu parles de sentiments, t’as l’air d’un imbécile. L’émotion est l’antidote, c’est le nouveau punk », lançait-il récemment au festival de Sitges.

Avec Alfonso Cuarón, autre invité du festival et ami, ainsi qu’Alejandro Iñarritu, le réalisateur fait partie d'une nouvelle génération de cinéastes mexicains au rayonnement mondial, qui ont su travailler main dans la main dans le respect de leur terre natale. Guillermo del Toro fait carrière en anglais ou en espagnol, mais gageons que l’âme de sa pieuse grand-mère de Guadalajara l’accompagne dans ses succès. Rythmé par la musique d’Alexandre Desplat, son dernier film, The Shape of Water, est présenté en avant-première française au festival Lumière : un conte sentimental et politique pour happy few qu’il a voulu suffisamment bizarre et sous contrôle, à l’image du personnage. Son premier film d’adulte.

 

Charlotte Pavard

 


 

Invitation à Guillermo del Toro

Catégories : Lecture Zen