Durian Durian

Pendant plus dix ans, Fruit Chan apprend les ficelles du métier, en tant qu’assistant-réalisateur auprès de quelques-uns des plus grands cinéastes hongkongais : Kirk Wong, Jackie Chan ou Alfred Cheung. En 1996, après avoir réuni des chutes de pellicule vierge sur les tournages où il a travaillé, il réalise Made in Hong Kong. Dans le contexte de la rétrocession de la ville, le cinéaste se penche sur le quotidien d’une jeunesse hongkongaise désœuvrée. C’est la consécration. Ce film indépendant, loué par la critique, reçoit trois récompenses au Festival de Locarno. Avec The Longest Summer et Little Cheung, le réalisateurconfirme son style singulier, libre et féroce.

Cinéaste aux préoccupations sociales, Fruit Chan signe, en 2000, Durian Durian, dans lequel il renoue avec le drame de l’émigration et explore l’enfer de la vie d’une prostituée. Le film amorce une trilogie autour du thème de la prostitution, poursuivie dans Hong Kong-Hollywood et Public Toilet.

Construit comme un diptyque, Durian Durian accompagne son héroïne depuis les ruelles mal famées de la ville, jusqu’aux paysages glacés de la Chine du Nord. Revenue dans sa région natale, Yan s’interroge sur son avenir. Pour le Nouvel An, elle reçoit un colis de la part de la petite Fan. Dans la boîte se trouve un durian, un fruit tropical étrange, à l’odeur lourde et écœurante, hérissé d’épines. Le durian envahit, comme un symbole complexe, le film de Fruit Chan. Il est tantôt une arme redoutable, tantôt une madeleine de Proust, le souvenir fané de la vie hongkongaise de Yan.

Pour ce film indépendant, au budget réduit, Fruit Chan s’entoure d’un casting non-professionnel. La critique salue l’actrice principale, Qin Hailu, qui reçoit plusieurs récompenses pour son interprétation et voit ainsi sa carrière lancée. Durian Durian est sélectionné à la Mostra de Venise. Le regard incisif et engagé de Fruit Chan l’impose comme une figure incontournable de la scène hongkongaise.