La fórmula secreta

En 1964, le Syndicat mexicain des Travailleurs de la Production cinématographique décide d’ouvrir au public le premier concours du film expérimental. L’âge d’or du cinéma national est terminé et les classes moyennes se détournent des films mexicains. Le syndicat avait pour ambition de reconquérir ce public et d’imposer un changement des mentalités. Ouvert à tous, le concours verra la participation de techniciens de l’industrie, pas encore devenus réalisateurs, et de partisans de la modernité et du renouveau, écrivains, universitaires, photographes… Le premier prix sera décerné à La fórmula secreta de Rubén Gámez, photographe de formation et réalisateur de Magueyes, projeté en préambule de Viridiana de Luis Buñuel au Festival de Cannes en 1962.

L’événement fait date dans le cinéma mexicain et révèle ce cinéaste expérimental. Sur un texte de Juan Rulfo, immense écrivain mexicain, lu par le poète Jaime Sabines, La fórmula secreta est un essai poétique filmé. Pour Tomás Pérez Turrent, il est la « seule œuvre réellement de recherche de tout le concours et la seule à proposer de nouvelles voies narratives et figuratives » (Le Cinéma mexicain, Centre Georges Pompidou). Avec un ton novateur et expérimental, renvoyant au surréalisme, les images de Gámez, comme autant d’instants photographiés, appuient les mots de Rulfo.

La fórmula secreta croise les questions de l’identité, du poids des figures familiales et religieuses, du sacré, celles des traditions et des mythes, de l’ouverture au capitalisme, et de la mort.

Ce moyen métrage expérimental, parfois appelé Coca-Cola en la sangre donne à voir un Mexique bien différent des images exportées auparavant. La fórmula secreta, quasi inconnu hors de son pays d’origine, est un objet artistique étonnant.