La Poursuite infernale

Sept ans après La Chevauchée fantastique, John Ford retourne au western et retrace l’un des plus célèbres affrontements de l’Ouest avec La Poursuite infernale. Wyatt Earp et la bataille d’O.K. Corral, immortalisée au cinéma par Ford, mais également par Edward L. Cahn, John Sturges, Lewis Seiler ou Louis King, appartiennent à la légende du Far West.

Ford retrouve ici les paysages grandioses de Monument Valley, qu’il avait déjà filmés dans La Chevauchée fantastique. Il dresse le portrait d’un Ouest sauvage, reculant doucement devant la civilisation. Ne faisant aucun cas de la vérité historique, sa vision de la fusillade d’O.K. Corral est une lutte toute symbolique entre la force et l’ordre, la violence et la loi.

Alors que le héros du western classique est mû par des forces brutales, haine, représailles ou révolte, le héros fordien n’est pas de ceux qui obéissent à des vengeances personnelles. Au contraire, chez le cinéaste, les épopées sont collectives et les héros agissent dans l’intérêt de tous. Ainsi, dans La Poursuite infernale, les scènes de communauté, les préparatifs du bal ou la construction de l’église priment sur la revanche du shérif. Ces instants rituels célèbrent la terre possédée et le souvenir des efforts et des souffrances endurées pour y ériger une société pacifiée.

« La passion qu’éprouve John Ford pour toutes sortes de cérémonies […] s’explique ainsi. Ce sont autant de preuves tangibles de cette possession que les personnages éprouvent le besoin d’affirmer, car il savent qu’elle peut leur être arrachée d’un moment à l’autre. De là aussi, dans les paysages, cette passion pour l’inaliénable, pour tout ce que le temps ne peut pas attaquer : plaines désertiques, rochers de la Monument Valley. On a l’impression que le cinéaste, comme ses personnages, veut posséder à tout prix ces étendues, en restituer la beauté la plus secrète, cette stabilité que recherchent les hommes. »  (Bertrand Tavernier, Amis américains, Institut Lumière / Actes Sud)