Melville se décrivait comme un fétichiste de l’accessoire masculin : « Un homme armé est différent des autres hommes et je vous assure que c’est un homme qui a tendance à porter un chapeau. Là, je parle pour le cinéma, mais un homme qui tire un coup de feu avec un chapeau sur la tête est bien plus impressionnant qu’un homme nu-tête. Le port du chapeau équilibre un peu le revolver au bout de la main. Cela fait partie de l’uniforme. »
Adaptant un roman de la Série Noire, Melville quitte les rues de Montmartre où se déroulait l’intrigue, trouvant que l’aspect trop documenté sur ce quartier parasitait l’action. Il en profite pour rendre hommage, par le décor, aux cinéastes américains qui l’ont inspiré : des fenêtres à guillotine recouvertes de stores métalliques, le local de police calqué sur celui des Carrefours de la ville de Ruben Mamoulian (1931), pas de bistrots parisiens, mais des bars… Un envoûtement des spectateurs, désiré par le cinéaste. Il délaisse également l’argot, qu’il n’apprécie pas. Il abandonne l’anecdotique et le pittoresque, choisit l’épure.
La mise en scène, classique mais implacable, met en valeur les grandes thématiques qui traversent l’œuvre de Melville : le double, la morale, la trahison, la mort. Inspiré par l’underplay de ses héros américains d’avant-guerre, Melville tire le meilleur d’une distribution impressionnante (Michel Piccoli, Jean-Paul Belmondo, Serge Reggiani).
« Melville burine de plus en plus son univers et ses personnages, en s’interdisant désormais la moindre digression, le moindre épanchement : une manière d’humanisme glacé. Ce n’est pas son moindre mérite, lui qui adorait (par goût personnel) les chemins de traverse, que de progresser maintenant dans la seule et ingrate voie de l’efficacité, à l’imitation d’un cinéma qu’il aime et que d’ailleurs je crois qu’il surclasse à bien des égards. » (Claude Beylie, Cahiers du cinéma n°141, mars 1963)
Le Doulos
France, Italie, 1963, 1h48, noir et blanc, format 1.66
Réalisation & scénario : Jean-Pierre Melville d’après le roman éponyme de Pierre Lesou
Assistants réalisation : Volker Schlöndorff, Charles Bitsch
Photo : Nicolas Hayer
Musique : Paul Misraki
Montage : Monique Bonnot
Décors : Daniel Guéret, Pierre Charron
Production : Georges de Beauregard, Carlo Ponti, Rome Paris Films, Compagnia Cinematografica Champion
Interprètes : Jean-Paul Belmondo (Silien), Serge Reggiani (Maurice Faugel), Jean Dessailly (le commissaire Clain), Fabienne Dali (Fabienne), Michel Piccoli (Nuttheccio), René Lefèvre (Gilbert Varnove), Aimé de March (Jean), Monique Hennessy (Thérèse Dalmain), Marcel Cuvelier (un inspecteur), Jack Léonard (un inspecteur), Carl Studer (Kern), Christian Lude (le médecin), Jacques de Léon (Armand), Paulette Breil (Anita), Philippe Nahon (Rémy)
Sortie en France : 8 février 1963
Remerciements à Studiocanal
Centenaire Melville : Hommage de Studiocanal et de l’Institut français avec la présentation du Doulos et de Bob le flambeur restaurés en 4K par Studiocanal, avec le soutien du CNC.
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