C’est d’une lecture nocturne de Celle qui n’était plus, premier roman prometteur du duo Boileau-Narcejac, qu’est né Les Diaboliques. Au petit matin, Clouzot achète les droits pour adaptation. Les auteurs sont encore inconnus, et fans de suspense, rêvent secrètement d’être adaptés par Hitchcock. Entre les mains de Clouzot et de son frère Jean, le roman est remanié, trituré, transformé, au point que l’intrigue est inversée, véritable travail de création et non plus seulement d’adaptation.
Avec Les Diaboliques, Clouzot signe un film noir, le suspense reposant sur de constants effets de surprise. Dans ce récit écrit du point de vue de la victime, le spectateur est constamment dupé. Et l’architecture de la machination est particulièrement retorse.
Les Diaboliques baigne dans une atmosphère trouble, décrit la petitesse d’un milieu médiocre, le sinistre et l’obséquieux ne laissant pas la moindre place à la pureté et l’innocence. C’est là la patte de Clouzot, qui traduit ses doutes sur la nature humaine et la frontière ténue entre bien et mal.
Le tournage, à l’ambiance délétère, aura beaucoup fait parler. Tout comme les méthodes de Clouzot. Au finale, l’opposition entre Vera Clouzot et Simone Signoret est palpable. L’une est fragile et soumise, quand l’autre est froide et calculatrice. Pour son premier grand rôle, Vera Clouzot, largement critiquée, est pourtant saisissante, telle une poupée effrayée aux yeux grands ouverts. Et encore une fois, les fidèles seconds rôles comme Larquey ou Roquevert sont indispensables.
Le cinéaste signe un film aux images fortes, une histoire cruelle mais à la noire beauté. Et pour en préserver le suspense, et contrairement aux habitudes de l’époque, il exige que les portes des salles de cinéma soient fermées dès le début de la projection…
« Le réalisateur semble avoir suivi à la lettre le vieux précepte classique : tout ce qui n’est pas indispensable à l’action est nuisible. Rarement mise ne scène fut plus efficace. Dès la première séquence, nous sommes saisis à la gorge par une poigne de fer, et pas une seule fois l’étreinte ne se relâche. C’est vraiment le triomphe d’un style, dur, dru, nerveux, incisif à l’image de l’homme. » (Jean de Baroncelli, Le Monde, 29 janvier 1955)
Les Diaboliques
France, 1955, 1h57, noir et blanc, format 1.37
Réalisation : Henri-Georges Clouzot
Scénario: Henri-Georges Clouzot, d'après le roman Celle qui n’était plus de Boileau et Narcejac
Dialogues : Jean Clouzot (sous le pseudonyme de Jérôme Géronimi), René Masson, Frédéric Grendel
Photo : Armand Thirard
Musique : Georges Van Parys
Montage : Madeleine Gug
Décors : Léon Barsacq
Costumes : Carven
Production : Henri-Georges Clouzot, Filmsonor, Vera Films
Interprètes : Simone Signoret (Nicole Horner), Vera Clouzot (Christina Delassale), Paul Meurisse (Michel Delassalle), Charles Vanel (le commissaire Fichet), Pierre Larquey (Drain), Michel Serrault (le surveillant), Jean Brochard (Plantiveau), Noël Roquevert (Herboux), Georges Chamarat (le médecin), Thérèse Dorny (Mme Herboux), Aminda Montserrat (Mme Plantiveau), Madeleine Suffel (la dégraisseuse), Jean Temerson (le garçon d'hôtel), Jacques Hilling (l'employé de la morgue), Robert Dalban (le garagiste), Jacques Varennes (le professeur), Yves-Marie Maurin (Patrick Dewaere) (le jeune Moynet), Jean Lefebvre (le 2ème classe), Henri Humbert (le jeune Patard), Johnny Hallyday (un élève)
Sortie en France : 29 janvier 1955
Ressortie le 8 novembre 2017
Remerciements au distributeur Les Acacias et à TF1 Studio
Restauration 4K par TF1 STUDIO et L21, avec le soutien du CNC, à partir des négatifs image et son. Un travail minutieux pour nettoyer tous les défauts liés à l’usure du temps a permis de rendre au film toute sa beauté.
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