Un homme, portant costume, lunettes d’écaille rondes et canotier, suspendu aux aiguilles de l’horloge géante d’un building : si une image devait symboliser le cinéma d’Harold Lloyd, ce serait bien celle-ci, familière à tous, même à ceux qui ne connaissent pas ce roi du burlesque américain. Cette image emblématique du cinéma muet est issue du film le plus célèbre de Lloyd, Monte là-dessus !
Le ton est donné dès la scène d’ouverture : un jeune homme fait ses adieux à deux femmes en larmes, un prêtre est présent, un homme lui indique que l’heure est venue, avec en arrière-plan, une corde au nœud coulant… Et non ! notre homme n’est pas condamné à mort, mais juste prêt à quitter sa ville natale pour Los Angeles où il promet de trouver une bonne situation afin de subvenir aux besoins de sa fiancée. Car l’homme est sérieux, optimiste, volontaire.
Harold Lloyd a créé un personnage de parfait boy next door. Dans cette comédie d’avant le krach de 1929, Harold est inséré dans la vraie vie, il est un homme moyen, travailleur, mais capable de tous les courages pour affronter les difficultés. Évoluant dans une ville en pleine métamorphose, le personnage offre un miroir de la société de son temps, une évocation de l’American dream, où l’on assiste au boom de la publicité et de la consommation.
Mais si l’homme est déterminé, il n’en reste pas moins maladroit et distrait. Et la force de Monte là-dessus ! réside dans la virtuosité de l’enchaînement des cascades et des gags, qui se succèdent à un rythme effréné. Avec une incroyable maîtrise de la cadence, le film enchaîne les scènes de lenteur et de rêverie et celles de rattrapage à toute vitesse. Car si tous les éléments semblent se liguer pour le faire tomber (pigeons, poutre, filet de tennis…), de l’ascension de Harold dépend pourtant son avenir : progression sociale, fortune et mariage.
Parfois doublé par un artiste de cirque ou par Bill Strother, un réparateur de clochers repéré alors qu’il escaladait une façade, Harold Llyod réalisa une grande partie des cascades lui-même : « Au début, j’étais mort de peur. Mais après avoir travaillé là-haut pendant quelques jours, je suis devenu aussi dingue que les autres ! » (cité par Kevin Brownlow, La parade est passée…, Institut Lumière / Actes Sud)
Monte là-dessus! (Safety Last!)
États-Unis, 1923, 1h10, noir et blanc, format 1.33
Réalisation : Fred C. Newmeyer, Sam Taylor
Scénario : Hal Roach, Sam Taylor, Tim Wheelan
Photo : Walter Lundin
Montage : T.J. Crizer
Production : Hal Roach Studios
Interprètes : Harold Lloyd (Harold, le garçon), Mildred Davis (Betty, la fille), Bill Strother (Jim Taylor, l’ami), Westcott B. Clarke (le chef de rayon)
Sortie aux États-Unis : 1er avril 1923
Sortie en France : 26 décembre 1924
Remerciements à Carlotta Films
Numérisation du film réalisée par Sony ColorWorks à partir d’une copie nitrate d’origine datant des années 1920. Restauration numérique réalisée par The Criterion Collection. Celle-ci a demandé plus de 300 heures de travail.
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