« Toute ressemblance avec des personnages réels… » Si André Cayatte, réalisateur de Nous sommes tous des assassins, Justice est faite, Les Risques du métier, brouille les pistes (les noms, les lieux, les circonstances diffèrent), c’est bien de l’affaire Gabrielle Russier qu’il s’est inspiré pour Mourir d’aimer. En 1969, la relation entre l’enseignante et son élève de 17 ans avait défrayé la chronique et passionné les Français. Une histoire d’amour interdite devenue drame après le suicide de Gabrielle Russier.
Dès l’annonce du projet de Cayatte, la polémique enfle. François Truffaut reproche au cinéaste de faire les poches des cadavres encore tièdes, demandant à Annie Girardot de refuser le rôle. Une fois en salles, le film bénéficie d’un très grand succès public, tandis que le juge d’instruction chargé de l’affaire reproche au cinéaste, dans une lettre ouverte, de vouloir faire le procès de la justice.
En filmant normalement la relation entre Danièle (bouleversante Annie Girardot) et Gérard, couple maudit soumis aux plus abjectes pressions, André Cayatte interroge la place de la femme et du mineur dans une France tout juste sortie de Mai 68, et écorne trois piliers de la société, la famille, l’enseignement et la justice. Et il poursuit son but avec une sincérité désarmante, une réelle simplicité dans la réalisation, sans apprêt superflu.
« Le très beau film d’André Cayatte, mené comme une interview par Pierre Dumayet, est un document accablant. Tout ce qu’il montre est vrai, a existé ou existe encore. Cela s’est passé comme ça, on ne peut l’accuser d’aucune atteinte à la vérité. Aidé par Me Naud, il lui a fallu faire attention, éviter les écueils, car après avoir tout fait pour empêcher la réalisation de son film, les "autorités" diverses l’attendaient au tournant, guettant la moindre erreur de conduite, pour interdire ou censurer. Allez voir comment on accule au suicide, à notre époque, une jeune femme de 32 ans coupable d’aimer un garçon de 17 ans. […] Mourir d’aimer. Une histoire d’amour qui va bouleverser la France. L’indigner aussi. Du moins, je l’espère. » (Michel Duran, Le Canard enchaîné, 20 janvier 1971)
Mourir d’aimer
France, Italie, 1971, 1h50, couleurs (Eastmancolor)
Réalisation : André Cayatte
Scénario :André Cayatte, Me Albert Naud, Pierre Dumayet
Photo : Maurice Fellous
Musique : Louiguy
Montage : Borys Lewin
Décors : Robert Clavel
Costumes : Michèle Richer
Production : Roger Fellous, Lucien Massé, Franco-London-Films, Cobra International
Interprètes : Annie Girardot (Danièle Guénot), Bruno Pradal (Gérard Leguen), François Simon (Monsieur Leguen), Monique Mélinand (Madame Leguen), Jean-Paul Moulinot (Monsieur Guénot), Claude Cerval (le juge), Jean Bouise (le juge des mineurs), Nathalie Nell (Thérèse), Marius Laurey (Monsieur Arnaud), Yves Barsacq (l'ami), Marie-Hélène Breillat (le Serpent), Édith Loria (Renée), Raymond Meunier (l'avocat de Danièle)
Sortie en France : 20 janvier 1971
Remerciements à LCJ Editions
Restauration à partir du négatif par le laboratoire Eclair, avec le soutien du CNC dans le cadre du plan de numérisation des œuvres du Patrimoine. Scan 4K.
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